Je le vois ... Il danse dans les airs, prend son élan, vole, concentré, le regard plongé dans les yeux de l'autre.
Sait-il seulement que j'ai retrouvé sa trace ? Sait-il que je suis là à l'observer, clouée dans un fauteuil roulant et que dans un instant le fil merveilleux, tout de tension et de confiance, va être rompu ? Parce que je vais crier son nom et qu'il se rappellera qu'un jour il m'a lâchée, pas seulement au trapèze, le salaud, mais dans la vie.
Un ratage au trapèze, cela peut arriver au meilleur des artistes, mais abandonner un partenaire blessé, c'est de la trahison ! Ma chute, j'aurais pu la lui pardonner, mais sa fuite !
S'il m'entend maintenant, s'il me voit, s'il chute, s'il meurt, c'est mon espoir que je perds. Qu'attendrais-je du jour qui vient ? Sa mort est la mienne.
Patience ! Patience ! Vivre !
Je tairai mon cri ; il ne m'entendra pas hurler son nom. Ce n'est pas sa mort que je souhaite, c'est voler que je veux, voler à nouveau,...voler en lui, si ce n'est avec lui. ... Et lui apprendre à marcher.
Mais comment ? Comment ?
Et bien … J'oserai, je le rencontrerai.
Saumur, août 2016